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COMMUNIQUE N°7

Mars 2002

Sexe, Rap & Flouze

 


Menelik
Doc Gynéco
Mc Solaar
Mr Oizo
Y a-t-il réellement un intrus ?

"Tout baigne, même pour les gens qui se plaignent. Aujourd'hui personne ne revendique dans le posse de Menelik. De la vie à ce jour nous ne ferons aucune critique..." Menelik

Chacun a en tête, pour les avoir suffisament entendus, les fameux refrains tant décriés du rap français, ceux à vocation ouvertement commerciale.
A ce sujet, les critiques acerbes entre rappeurs ont toujours été légion, à l'image de ce qu'exprime "la Mafia K'1fri" dans un featuring sur un album d'Idéal J :

"Chaud, on fait notre entrée dans l'business show. Anti-facho, les re-nois au crane chauve sont chauds, ramènent les faux à l'échafaud. Il faut différencier le vrai du faux." Mafia K'1fri

Garou
Stomy Bugsy
K-mel
Felix Gray
Y a-t-il réellement un intrus ?

Il y aurait ainsi le rap des "faux", clairement identifié par des textes édulcorés, festifs, standardisés et consensuels (qui appuient le consensus, qui appellent à la paix sociale).

Et il y aurait, par opposition, le rap des "vrais", venant des coeurs les plus meurtris, exprimant les sentiments les plus profonds et les plus authentiques (qui remettent en question par essence l'ordre des choses)...

Bien qu'elle soit simple et séduisante, nous ne soutenons pas cette thèse.

Neg Marrons
113
NTM
G Squad
Y a-t-il réellement un intrus ?

Car au delà des rôles différenciés que jouent les tenants du rap français actuel, il y a une flagrante unité.
Tous aspirent clairement, par le rap, à accéder au statut de "star", de personnage public bénéficiant de tous les privilèges que compte cette société.
Pour eux, faire partager ses idées n'est plus une fin en soi mais un moyen.

Cela se note dans le choix des thèmes abordés, très souvent fictifs et inconsistants.
Cela se note aussi, comme nous allons le voir, au hasard de petites phrases, lourdes de sens, qui viennent ponctuer leurs "messages" graves ou futiles.

Les vertus de la gloire et de l'argent, comme moyen de promotion sociale et d'accès à la consommation de luxe (la "bitch de magazine beaucoup plus bonne que la plus bonne de tes copines" en faisant partie), y sont en effet louées massivement.
On n'invente rien. Il était grand temps de faire une mise au point.


 

 

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1) La gloire

Disiz la Peste

Il suffit d'écouter attentivement les appels maladroits de nombreux rappeurs pour comprendre la pauvreté existentielle dans laquelle sont plongés ces personnages censés représenter une part grandissante de la jeunesse.

La soif de reconnaissance est une des dominantes de leur discours, tout comme l'est leur individualisme et leur matérialisme notoires.
Preuve en est ce florilège d'extraits choisis, issus de chansons diverses et multi-diffusées.

"Mec, faute d'avoir la gloire, j'veux la reconnaissance..." Arsenik

"J'suis un bosseur qui protège ses arrières. Ma carrière, je la vois longue et vitaminée..." Driver

"J'rappe pareil dans l'underground que d'vant une foule de prolos ! J'veux l'gros lot..." Triptik

Ben J (Neg Marrons)

"Faut qu'on devienne des superstars puisque le rap ça pèse..." La Brigade

"J'ai pas d'gen-ar mais je s'rai une star ! Faut qu'j'm'en sorte par n'importe quel moyen avant qu'il n'soit trop tard. A la radio, j'dépasse les quotas. Faut pas d'rotte-ca ! Papotte pas, donne le cash, ferme ta gueule sinon ça se-ca." Stor-K

"J'suis sur toutes les radios, j'ai des clips vidéo, on s'échange mes démos, j'ai une putain d'promo. Un riche en sursis : toi même tu sais que Secteur A m'appuie." Doc Gynéco

"La foule, les claps et les flashs... Tu t'fous dans les clips et les pages. Les portes s'ouvrent, négro, en couv' du RER et du Black Match du mois. Voila l'Platine du mois avec lequel tu pètes dans la soie. Voila la belle vie t'porte au Top Virgin - Fnac. Des meufs que tu pètes à tout va ! Business, victoire et lliass-ca..." Passi

"Sûrement qu'un d'ces jours, on verra ma tête en première page, piègé par les paparazzi..." La Clinique

"J'passe de studio en promo, j'suis l'gosse-beau sur des photos..." Sniper

"Regarde moi ! J'traîne avec des sapes toutes neuves ! Autographes pour toujours, regards en coin des meufs. Et sur la tête de ma reum', j'aurai des patates ! Le but est l'cash, vivre large avec des ma-fats..." Les Sages Poètes de la Rue

"J'ai mille et une filles qui sonnent à ma porte, voulant qu'j'descende, souffrant des conséquences de ma présence de janvier à décembre..." Beat de Boul

Extraits Audio (0,5Mo)
"La gloire"

 

 

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2) Le fric

Les Sages Poètes de la Rue
sur le tournage d'un de leurs clips

Avec la reconnaissance publique vient l'argent.
C'est admis, bien évidemment. Ce serait même légitime dans notre société d'abondance où le talent artistique, lorsqu'il est reconnu, vient consacrer une vie bourgeoise et emplie de privilèges...

C'est le genre de logique libérale que chacun a intégré profondément, dans la mesure où elle est constamment relayée dans les médias de masse.
En un sens, cela explique pourquoi nos rappeurs hexagonaux apparaissent si décomplexés en ce qui concerne l'éventuelle fortune que pourraient leur procurer leurs oeuvres.
D'ailleurs, à les écouter attentivement, on peut constater avec quelle force l'argent les stimule.

"On est au centre du biz, toujours les devises. Et si on vend des disques, n'oublie pas nos royalties. Tu veux un remix : c'est 20 000 F ! Et payé comptant, car on n'joue pas avec l'argent..."
"Ouais, Dan le lyriciste, j'grille la piste, ne rappe pas gratis..." Les Sages Poètes de la Rue

"Déballe le tapis rouge, laisse nous amasser la caillasse..." 113 Clan

"Et si mon style plombe, c'est seulement pour qu'la caill' tombe..." La Brigade

Kenzy (Président de Secteur ä)

"A ma gloire. Tout pour l'oseille..." Mystik

"Oui, fais comme les Neg Marrons qui gagnent leur vie intelligemment : nous on ne tchatche pas pour l'argent, mais de nos jours, rien ne se fait gratuitement. Donc si tu veux nous écouter, paye cash et comptant !" Neg Marrons

"Quand les fils de salopes prétendent faire du vrai Hip-Hop : l'important c'est la maille, le flouze, la pèche, la classe ! Quoi ? Appelle-moi Stomy Bugsy Montana..." Stomy Bugsy

"Les re-frés Moda & Dan s'impliquent et font du fric... Je rentre à l'hôtel, tous frais payés pour ma musique..." Fabe

"1 pour le show, et 2 pour le fric..." La Cliqua

"J'veux palper des milliards. Par le biais d'la musique, ma rage j'vous la communique..." Dany Boss

"J'ai la manie, manie de penser à la monnaie. Quand je manie les billets, je me sens bien. C'est mécanique dans ma tête, mes neurones font la fête. Quand je manipule de l'argent, j'suis content. Yeah ! Yeah !"
"Quand mes poches sont percées, à tout prix il me faut de l'argent. J'veux du bénéfice. Pour cela j'suis prêt à faire des sacrifices dans ce royaume plein de vices. K par Kas aime le cash, comme les enfants kiffent Pocahontas. A vrai dire, j'suis content que quand j'manie des liasses de billets. J'ai la monnaie dans l'esprit, et depuis longtemps c'est avec cette pensée que je vis. Accompagné de mon posse, parfois y a pas d'gen-ar, trop d'soucis. Rec-di, à ce moment là, j'fais mon nesbi. Pour l'année 1997, pas d'nouveau concept, dans mon cerveau, prioritaire est l'espèce..."
K par Kas

Monsieur R et Diam's

"J'veux qu'ma vie soit une bonté, au sommet monter, une bonne santé, d'l'argent sans avoir à le compter..."
"Ecoute c'qu'on dit, bouffi ! Un d'mes défis : faire du profit." D-Abuz

"Qu'ça soit clair : Si j'rappe, c'est 1 pour la rue, 2 et 3 pour la maille, frère..." Lunatic

"J'ai pas un flech' en poche, donc mon flow flaire le cash. Ca c'est clair ! Clair comme l'eau de roche ou clair comme les yeux d'Anne Saint-Clair. Clair que j'veux une pure caisse, de la fraîche dans mes fonds d'caisse pour que t'encaisses !" Seul 2 Seul

"C'est ainsi que je vois la vie : des liasses de billets, les cartes de crédit. Plein aux as et entouré de tous mes homies. Cool, je me prélasse sous les palmiers. Mes rêves les plus fous sont devenus réalité." Koalition

"On pète le Champagne, on nique les bénéfices..."
"Ma vie, j'la conçois avec des femmes et du fric..." La Clinique

"Travaille, travaille pour concrétiser tes désirs. Nous voulons de la thune, nous voulons du cash, nous voulons de la thune. Ouais ! K par Kas, c'est cash !" K par Kas

"Esprit mafieux : Oxmo Puccino, tout pour le cash et chacun pour soi..." Oxmo Puccino

"Je suis de la partie pour du cash ! 1 pour le cash, 2 pour le flow..." Kid Noriega

Extraits Audio (1,3Mo)
"Le fric"

 

 

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3) Le fétichisme de la marchandise

Passi (Ministère Amer), Mystik,
et Doc (2Bal)

Les rappeurs se font inexorablement les représentants de commerce de l'industrie du luxe.
Leur "rêve" semble unanimement se matérialiser par la possession d'une grosse voiture coûteuse, de ce genre qui a toujours accompagné l'imagerie du gros bourge puant.
Pire, ils le revendiquent. Et n'hésitent pas, dès qu'ils en ont les moyens, à se procurer et à exhiber leur puissante automobile.

A cette occasion, ils font démonstration à la société toute entière qu'ils sont de bons consommateurs, et surtout, de bons promoteurs de la consommation.
Dès lors, de vraies responsabilités peuvent leur être confiées...

Dans notre société de division, l'intégration par la consommation est l'unique alternative proposée.
Les rappeurs, dont la fonction était à l'origine l'expression d'un contre-pouvoir à l'exploitation humaine, sont aujourd'hui les derniers à s'en émouvoir. Et pour cause, ils sont les premiers à en bénéficier, profitant des larges retombées financières qui leur sont accordées grâce à la vente de leurs disques. Leurs préoccupations changent ainsi proportionnellement pour se rapprocher de celles des possédants.
Entre ceux qui le vivent déjà, et ceux qui y rêvent encore, voici quelques citations sans équivoque...

"Avec mes versets, j'espère avoir la Mercedes et percer..." Zoxea

L'américain Jay-Z montre
l'exemple à suivre.
Le symbolisme de cette pochette d'album est suffisament fort pour qu'on ne doute pas du "contenu explicite" annoncé... De ce genre de contenu recommandé aux parents voulant inculquer des
valeurs bien rétrogrades
à leurs enfants.

"J'suis l'mec qui fait du business pour avoir d'la maille. Mon objectif, avoir un compte en banque bien rempli, rouler en Mercedes, et comme passagères que des ladies..." M Group

"Ca tourne et la chance part, j'rêve que d'barres et d'BM, j'suis un d'ces mômes qu'on recense pas..." Lunatic

"Ca fait partie d'mon cursus, sans plus. Donc j'rêve de luxe, de Porsche, de Lexus..." Triptik

"Car le Stor-K en stard-co, au volant de sa Merco, sans accros, que-cro le narco. Eh, j'suis pas un macro !" Stor-K

"Avec un flow d'bico qui résonne dans tous les barios, on compte se faire du cash pour, avec, rouler en Merco. Sapé en costard à la bouche un putain d'cigare..." 113 Clan

"Moi, j'suis Z.O.X.E.A, j'roulerai en limousine..." Zoxea

"Je touche ma Sacem et j'investis dans un BM. Je pèze, je baise toutes les filles. Même l'homme qui met son doigt dans ton intimité a prostitué ton rap sur le Boulevard Né." Doc Gynéco

Driver, bon élève.

"Tout d'abord, je me vois cool dans une voiture de sport, décapotable de préférence. Le soleil chauffe à mort. Fréquentant les hôtels, les plus beaux tops models. Ah ! Pour moi la vie est belle..." Koalition

"J'veux un cabrio à la place de ma Corsa, sur mon passage, qu'elles enlèvent leur corsage, leur corps pas sage...." D-Abuz

"J'veux une Mercedes Benz belle comme une déesse. En signe extérieur de richesse : cuir à l'intérieur. Supérieur : vivre à mille à l'heure dans une villa, draps de satin qui caressent mes fesses tous les matins..." Kid Noriega

Lord Kossity, en séance photo
pour illustrer un de ses interviews

sponsorisé par Yamaha
dans la presse spécialisée "HH".

"Hé ! Ouais ! Je roule en cabriolet, c'est vrai... vraiment plus facile quand le chauffeur te prend à domicile..."
"Sachez que désormais ma vie est fête : Monsieur prend-il la Jaguar ? Non, non. Peut-être en fait, oui. C'est net, la journée est parfaite. Charles, plus vite, je vais louper le soundcheck..."
"Tout ceci n'était qu'un rêve..." NTM

"Voilà le boss Dany en star-co et en Mercedes. Enfin, ma vocation : le rap..."
"J'ai envie d'luxure, de belles chaussures, d'une villa Côte d'Azur. Juste car j'suis comme tous les hommes qui rêvent jusqu'à l'usure..." Dany Boss

"Pour moi, c'est 1 pour le cash, 2 pour la frime. Weston à 6000 Francs en guise de team : Limousine, champagne millésimé, fois gras, homard, caviar pour le dîner." L'SKdrille

"Moi l'as, d'la race du Hamas, qui rêve devant Dallas, les palaces, mais qu'à toujours pas d'gen-ar pour ma race..." Stor-K

"Je déguste un cocktail, Vuarnet sur la tête, signe des autographes. Que veux-tu ? J'me la pète ! Je rentre à l'hôtel, on me file ma suite. Ce soir j'invite mes lascars, les serveuses ont des fuites..."
"On va flamber au casino, la roue tourne. Faites vos jeux. On ramasse les lingots. On dîne dans le restaurant le plus chic de Cannes. On nique le bénéfice, c'est ma tournée générale." La Clinique

Extraits Audio (1,3Mo)
"Le fétichisme de la marchandise"

 

 

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4) Les salopes

Doc Gynéco (Ministère Amer)

On notera que le matérialisme sans détour dont la majorité des "rappeurs" font preuve s'apparente instinctivement d'un mépris de la Femme.
La Femme étant principalement considérée comme un produit de consommation "de luxe" parmi d'autres, comme un objet voué exclusivement à l'assouvissement des pulsions du "sexe fort".

Un des couplets du groupe Les Seuls est sans appel :
"Les portes du rêve, le succès, la renommée : blindé, plein d'pétasses à mes pieds qui avant n'savaient même pas qu'j'existais. Je parle d'mes rêves, pas d'mes cauchemards. Tôt ou tard, tu verras Les Seuls, les vrais. Inch Allah. Dans la mêlée du rap français, pas de répis. Mon seul hobby, m'en mettre plein le compte en banque..."

Une fois de plus, il est clair que c'est surtout la frustration vécue au quotidien par ces "artistes" qui suinte de leurs textes.
Et une fois de plus, est admise et surtout confortée l'idée que le règne de l'argent fait de la Femme (et donc de l'Homme) un objet de consommation, une marchandise.


Annonce d'une soirée Hip-Hop à grand renfort de pinups...

Exposées pour vendre, les filles vues dans les clips, sur les publicités, sur les CDs et mix-tapes, sont quasi-exclusivement "sexuelles". Autrement dit, à travers ce qu'on en perçoit, il ne leur est pas reconnu d'autre nature... Elles ne sont bonnes qu'à être des "pinups" (littéralement : "qu'on accroche au mur").

Et comme nous le rappelle la réalisatrice Catherine Breillat :
"C'est une vision masculine la pinup. Elle est forte, mais elle n'est forte qu'en poitrine. On la domine autrement. Elle est quand même faible. Les pinups, elles ont ce sourire éclatant et elles ont l'air de dire que d'être consommée, c'est un plaisir. Et qu'après tout, elles sont faites pour ça. Elles sont à l'étalage."

Il est grave de constater que personne ne s'en émeut. Une fois de plus, les acteurs du soit-disant Hip-Hop français ne remettent pas en question l'odieuse domination patriarcale qui sévit dans la société toute entière. Ils en rajoutent même...

"Comme des femmes envahissent mon agenda, sex and sun, allongées sur la vérenda..." Le Cercle

"J'rappe, squatte une big villa pleine de filles..." D-Abuz

Mix-tape de DJ Kost n°13
"spécial Mafia K'1 fri"

"Mais ne soit pas fâchée contre les Filles d'à côté qui dans leur classe de mannequins veulent m'attirer..." Doc Gynéco

"J'veux c'qui m'revient d'la plupart des richesses où on est allés. Stomy Bugsy, c'est comme ça qu'on m'appelle. Tu sais, le beau gosse avec le costard, la coupe de champagne et le cigare. Et les rates de tes rêves, j'en ai à la pelle ! J'ai tout connu..." Stomy Bugsy

"Mais qui c'est ? Bonne question, c'est JP ! J'suis un type qui trip sur les tass' et les billets. Eclate toi, laisse toi aller. Allez, ici y a pas d'lois. Y a pas d'contrôle de papiers, c'est l'pied, poupée... J'suis équipé d'un nouveau style pour appâter la maille et les filles faciles. Ecoute ça, ça arrache, attache ta ceinture. Sache que j'lache des textes pour être "Yes" dans l'futur. C'est sûr !" JP

"Sanguins, on arrive à péter des vagins..." Iron Sy

"Aie ! Faut qu'une tass' me suce ! Relaxe, mec... Vas-y, prend une taffe de plus !" Salif

"De retour de New York City, elle veut mon Karl Kany. J'adore son boule et son torse, mais pas ses sales manies." Différent Teep

Publicité pour Coma Sound Kartel
"Hip-Hop Sound / Graffiti Store
/ Street Wear Shop"

parue dans la presse spécialisée...

"Je prends du gen-ar, j'ai mis ta rate sur le trottoir. On ne peut te la rendre, elle nous rapporte des milliards ! Ne me considère pas comme le pantin du rap actuel... (sic !)" La Clinique

"On aurait dû préter l'oreille à Stomy Bugsy, le lapin-gangster aux mille et une raclis. / Je vous en aurai prèté 2-3 pour la nuit..." Les Rongeurs & Stomy Bugsy

"J'ai passé la journée avec une meuf terrible : une bitch de magazine beaucoup plus bonne que la plus bonne de tes copines..." NTM

"Y a d'la ratte, c'est pour les bicos. Y a d'la négresse pour les négros..." Sniper

"Quoi qu'on dise sur toi, ma salope à moi... Quoi qu'on dise sur toi, j'suis love de toi." Doc Gynéco

"J'aime les tass' mais j'veux pas dire à mes gosses qu'elles aiment les grosses voitures et les grosses queues..." Lunatic

Extraits Audio (0,9Mo)
"Les salopes"

 

 

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5) Le fantasme de la grande délinquance

Rocca (La Cliqua), Jacky (Neg Marrons),
Oxmo Puccino, Pit Baccardi, Sat (Fonky
Family), et Delta (Expression Direkt)

Il est intéressant de noter qu'il y a deux images qui alimentent l'imagination des rappeurs, ces authentiques "représentants des jeunes de quartiers" comme ils aiment tous à s'enorgueillir.

La première est, comme nous l'avons vu, la reconnaissance médiatique à tout prix, qu'elle soit avouée (pour les "faux") ou refoulée (pour les "vrais").
La deuxième est sans aucun doute le fantasme de la grande délinquance, où "mafias", "gangsters" et "business" sont aussi des moyens d'accès à l'aisance matérielle immédiate et démesurée.

Qui s'étonnera encore qu'il y ait eu un soin particulier à la véhiculation de ces modèles (criminels mais tellement fascinants) au cinéma et à la télévision ?
Une fois de plus, à travers ces thèmes récurrants, l'apologie du fric domine. Et elle domine d'autant plus aisément qu'elle a déjà asservi la société toute entière.

"Si je dois buter, tuer pour l'fric, si je dois tirer, flinguer pour ma clique, s'il faut choisir entre toi et moi : tu sais c'que j'peux t'faire, Black Mafia, tu sais quoi pas m'faire !"
"Le flingue à gauche, l'oseille à droite. Un conseil, espèce de fils de..., paye et baisse les yeux ! Moi j'suis le black mafiosi..." Oxmo Puccino

"Moi et mes frères, on est unis comme la mafia..." Kid Noriega

"Façon fiction, j'me vois Scareface dans un grand pavillon. Mes gars sont là, ma fortune s'estime à des millions. J'ai trop d'fric, donc pour les femmes, j'suis l'plus mignon. Costume trois pièces, téléphone portable pour livraison du trésor : dans ce trip on m'appelle Patron..." L'SKdrille

"Ma tronche sur les biffetons : J'aimerai bien être le Parrain et t'appeler fiston." Lunatic

"Mon papa à moi est un gangster, il fait partie du Ministère Amer..." Stomy Bugsy

Tequilla et Scalo,
présents sur l'album de Doc Gynéco
"Liaisons dangereuses"

"Comme dit le dicton : Quand on tire, on n'raconte pas sa vie. J'mets une balle dans l'barillet et pécho une liasse de llet-bi. Mon gun brille et j'vais en ville voir mon gang, les Young Guns, affuté comme les 12 mercenaires parés pour l'big bang !" Tequila et Scalo

"J'ai plein d'liasses de billets. L'gilet pare-balles, j'espère qu'il y est. Quiconque passe, sur sa tête j'vide mon barillet." L'SKdrille

"Tant aurais voulu être gangster..." J-Mi

"Clic, clic. Je n'ai plus de balles. J'ai vidé mon chargeur, je me sens mal... Clic, clic. Je n'ai plus de balles. J'ai vidé mon chargeur, je me sens mal... Clic, clic. Je n'ai plus de balles. J'ai vidé mon chargeur, je me sens mal... Clic, clic. Je n'ai plus de balles. J'ai vidé mon chargeur, je me sens mal..." Polo

"Hey ! Vomblard ! J'ai rancard avec Nanar. Appelle les chtars', v'la Bruno Escobar ! / Touché mais pas coulé, merci d'l'invitation..." Doc Gynéco & Bernard Tapie

Le plus cyniquement lucide est peut-être Oxmo Puccino, lui qui a fait du mythe du Parrain son fonds de commerce, et qui l'admet sans détour dans un featuring sur l'album du D-Abuz System : "J'aime parler de guns et d'crimes. Parce que ce fut un premier critère d'frime. Maintenant c'est ma plume : plus de thunes et moins d'flics (...) Des mixtapes aux Disques d'or..."

Extraits Audio (0,8Mo)
"Le fantasme de la grande délinquance"

 

 

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6) La religion

Le Monde, 28 septembre 2001

Récemment, on pouvait lire un article du journal Le Monde (du 28 septembre 2001) intitulé "Les rappeurs musulmans rejettent la radicalisation de l'islam".

Tentant de canaliser l'état d'esprit de la jeunesse française issue de l'immigration (au moins celle d'obédience islamique) à l'annonce des "attentats contre le monde occidental", le consensus général fit que l'on se servit une fois de plus de nos très chers représentants-marionnettes de service :
"Vedettes du hip-hop et de culture musulmane, Disiz La Peste, Kery James, Wallen et d'autres condamnent les extrémistes responsables des attentats du 11 septembre, et disent leur attachement aux valeurs morales de cette religion, qui imprègne leurs textes..."

Le message a le mérite de ne pas être voilé. Les rappeurs concernés par cette série d'entretiens (Disiz La Peste, Kery James, Wallen, les NAP, Sat de la Fonky Family) font office de garants du maintien de l'ordre mondial (et moral) à travers leur religion. Un exemple de plus attestant qu'après avoir érigé en "vedettes" les plus dociles, on manipule allègrement leur "représentativité".

Daddy Lord C (La Cliqua), en Emporio Armani, explique dans L'Affiche :
"On n'est pas partis à l'aventure.
On est des professionnels."

Chacun a pu constater que la plupart des rappeurs-business n'oublie jamais de s'exprimer sur un ton prosélyte (au détour d'une dédicace, d'un interview ou d'un morceau) pour affirmer sa foi indéfectible en Dieu.

Ce que la chanson de variété, aux propos déjà très conservateurs, nous avait épargné, les marchands du rap l'imposent : Ils revendiquent ce traditionalisme par lequel l'individu doit se soumettre à l'ordre éminemment archaïque fabriqué par la religion et son cortège d'abominations tristement trop actuel.
Ici encore, sous couvert d'un conformisme agressif conforté par la vulgate passe-partout de la défense des identités culturelles, les marionnettes du rap s'évertuent à conforter la société de classes.

Puisque le mysticisme, l'ethnisme et le communautarisme se combinent avec l'individualisme utilitariste et la destruction de la liberté politique dans les objectifs du Capitalisme en guerre économique, les rappeurs du fric n'ont plus qu'à clamer le respect de ces valeurs religieuses qui ont si bien su tenir en laisse leurs ancêtres.
A l'instar des grandes puissances impérialistes, les curés du rap nous démontrent, à leur façon, ô combien le couple pognon-croyance fait aujourd'hui plus que jamais bon ménage.

Voici une illustration de plus par ces quelques extraits d'interventions rapothéologiques :

"On taffe dur, défend nos principes, et ça c'est sûr, sur lesquels on s'accroche pour tenir le coup. Et merci encore à Dieu qui sans cesse veille sur moi, en ce qui m'concerne me donne la force pour aller jusqu'au bout." Fidel Escroc

"Prêt à foutre le feu... Oh mon Dieu miséricordieux !" Monsieur R

Rocca (La Cliqua)
insiste sur la croix qu'il porte.

"Merci Dieu, juste pour être en vie..."
"Notre issue finale, seul l'avenir le dira. Dieu seul sait comment ça s'finira, on négociera..."
"J'dois rien à personne, si ce n'est à Dieu, ma mère, FF, mes enfoirés et moi-même, mes frères..." Fonky Family

"J'me mets à genoux seulement pour prier." Radikal Kicker

"Chacun pour soi, et Dieu pour tous." Proff

"Mes rêves sont hantés, par ta vision j'suis tentée maintes et maintes fois d'pleurer, d'crier à Dieu pourquoi c'est lui qu't'as pris ? Prier c'est mieux que désespérer..." Lady Laistee

"Au nom du Père, du fils et du Saint Esprit..." L'Ame du Razwar

"Dieu aime ceux qui s'aiment, ceux qui sèment l'amour à n'importe quelle heure..." Mystik

"Un souhait, un voeu, une clef, une porte : rendre les miens heureux... Allah fait qu'on s'en sorte ! Le pognon, l'million... J'songe, ce rêve me ronge..." Les Seuls

"Saddam, tu ne me feras pas croire à moi, que tu fais la prière en dehors des caméras. Sais-tu au moins qu'exhiber son portrait dans tous les coins est interdit par notre livre saint : le Coran."
"Dieu a signifié aux hommes de toutes les races : Ne fais pas aux autres ce que tu n'aimerais pas que l'on te fasse."
"Ce n'est pas sans fierté que j'avoue avec émoi que je pourrai croire en Dieu, en toi, en moi, et j'y crois..."
IAM

"Quand je regarde autour de moi et que je vois que l'indifférence et l'égoïsme tue parfois, alors je prie le Seigneur, et je garde la foi. Et je me dis qu'après la pluie, le beau temps viendra..." Schkoonk

"T'as beau avoir plein d'potes, mais t'as qu'une mère et une seule religion, un seul Dieu, à qui tu peux te confier comme à son enfant. Tends tes mains vers lui et ne lui demande rien de matériel, juste qu'il protège ta famille et les gens qu't'aimes loin des problèmes..." 2 Trepides

Extraits Audio (0,9Mo)
"La religion"

 

 

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7) La médiatisation

Yannick (Mafia Trece), heureux.

Considérant la puissance des médias audio-visuels, chacun constate bien à quel point l'offre crée la demande. Le matraquage multi-support fait ses preuves depuis suffisamment de temps, écoulant toujours plus de "produits-marketing"...
La meilleure preuve en est bien le sursaut de la production francophone à la suite des directives imposées par le CSA en matière de quotas radiophoniques.

Dans ce contexte, le "Disque d'Or" tant convoité vient logiquement matérialiser la réussite commerciale du rappeur. Comme le confirme sans complexes D-Abuz, "Si tu piges pas : dehors ! Dis pas qu'j'dors, j'taffe pour les disques d'or..."

Lino (Arsenïk), récompensé.

Ou bien même les jeunes rappeurs Tequilla (frère de Calbo et Lino d'Arsenïk) et Scalo en réponse à la question du Magazine spécialisé Radikal (n°27) leur demandant s'ils ont des rêves : "Ce serait peut-être avoir des disques d'or (...) Quand tu rappes, c'est clair qu'il y a une envie d'argent. Maintenant tu vois des gens qui se font du fric et tu te dis : Pourquoi lui il rappe, il a de l'argent et moi j'en aurais pas ?"

C'est bien triste. Car les rappeurs, une fois la notoriété acquise (on peut même dire "construite") sont prêts à beaucoup pour s'enrichir un peu plus.
Les industriels n'ont aucun mal à les convaincre de soutenir diverses campagnes promotionnelles, pourtant extérieures à leur domaine de compétence initial.
Le très conservateur Passi expliquait cela très simplement au cours de l'émission Capital (sur M6) : "C'est un deal. On sait qu'on représente une certaine image, on sait qu'il y a des jeunes qui
écoutent nos paroles, nos musiques, etc...Et moi, c'est mon gagne-pain, c'est mon métier aussi. Donc j'capitalise tout ça."

Extrait Audio (0,6Mo)
"Passi sur M6"




Disiz La Peste
pour All Access
Passi
pour Reebok
Lady Laistee
pour Tommy Hilfiger
Saïan Supa Crew
pour Adedi


Quand Disiz La Peste s'affiche pour la ligne vestimentaire All Access, quand Passi vante les mérites de la marque Reebok, quand Lady Laistee pose pour Tommy Hilfiger, quand les membres du groupe Saïan Supa Crew se font sponsoriser par Adedi, quand le groupe 113 se fait démonstrateur de scooters MBK sous la gouverne de Skyrock, c'est toute une frange de la jeunesse ("leur cible marketing") qui est soldée aux marchands.

Extrait Audio (3,3Mo)
"113 sur Skyrock"




Jean-Marie Messier (Pdg du groupe Vivendi Universal), et Pierre Lescure (Pdg de Canal+)

Finalement, quand on écoute bien les rappeurs, on comprend mieux pourquoi ces "artistes" sont soutenus avec tant d'enthousiasme par de grandes sociétés telles que Universal, Sony, EMI, Warner, BMG ou Virgin...
Ils jouent un rôle capital dans le développement économique qui nous oppresse !

Non seulement leurs refrains appuient un type de gestion de la société (assurément inégalitaire) qui assure la bonne succession de leurs affaires conjointes, mais en plus ils accréditent l'idée d'une économie généreuse qui sait partager les ressources générales avec tout le monde, même avec les populations habituellement les plus méprisées. Une façon de plus de nier la répression qui agît tous les jours dans les quartiers...
L
es télés, magazines, journaux et radios agissent de concert dans cette propagande idéologique en soutenant ces nouveaux geoliers de l'esprit, marchands de mensonges et d''illusions, que sont les rappeurs-marchands.

Bad Azz sur la jaquette de l'album "Personal Buisiness" (Virgin)

Rappellons-nous du très réaliste appel à la modération du directeur du FBI Edgar Hoover à une époque, les années 60, où les forces révolutionnaires issues des masses exploitées menaçaient de l'intérieur l'équilibre de la nation américaine :
"Ne vaut-il pas mieux être une vedette sportive, un athlète bien payé ou un artiste, un employé ou un ouvrier (...) plutôt qu'un Noir qui ne pense qu'à détruire les institutions ?"

On saura voir qu'il annonçait déjà le nouveau mode de récupération des jeunes afro-américains : l'accès de quelques-uns à la liberté et aux richesses de ce bas monde en échange d'une exemplarité, d'un rôle consensuel prônant la paix sociale et acceptant la guerre économique.

Et c'est bien cette même tendance qui déferle en France depuis une dizaine d'années.
Ces images de bons samaritains, tout le monde les connait. Elles sont diffusées massivement dans les médias, dont le modèle économique est fondé sur la vente d'espace publicitaire à des annonceurs industriels en échange d'un auditoire le plus large possible.

Eminem décoré par Pascal Nègre
(Pdg de Universal Music France)

La boucle est bouclée. Les intérêts sont partagés. Tout l'équilibre de l'économie en dépend.
Le moindre rappeur qui est mis en avant l'est fait sciemment pour faire l'apologie de la consommation, et donc promouvoir le système libéral. Dorénavant, nous ne l'ignorerons plus.

A la lueur de tous ces éléments, la réflexion de l'intellectuel américain Noam Chomsky résume distinctement la situation :
"La foule doit être détournée vers des buts inoffensifs grâce à la gigantesque propagande orchestrée et animée par la communauté des affaires (américaines pour moitié), qui consacre un capital et une énergie énormes à convertir les gens en consommateurs atomisés - isolés les uns des autres, sans la moindre idée de ce que pourrait être une vie décente - et en instruments dociles de production (quand ils ont assez de chance pour trouver du travail). Il est crucial que les sentiments humains normaux soient écrasés ; ils ne sont pas compatibles avec une idéologie au service des privilèges et du pouvoir, qui célèbre le profit individuel comme la valeur suprême."
(Noam Chomsky, Deux heures de lucidité, Editions des arènes, 2001)

 

Face à ce mépris explicite, comment se reconnaître
dans des valeurs "Hip-Hopiennes" originelles de respect et d'unité,
valeurs décidément bien mortes ?

En tout cas, que ce soit dorénavant clair :
Toutes ces valeurs véhiculées
aujourd'hui
par l'ordre dominant au travers du rap...

On chie dessus !


Rapaces

 

 

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